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Collage et Clarification du vin (vinification)

Le collage est un processus de clarification du vin. Cette pratique connue depuis très longtemps n’est appliquée aux grands vins que depuis le XVIIe siècle. Elle est utilisée par le vigneron pour clarifier le vin en fin de fermentation ou en préventif, pendant la fermentation alcoolique. Elle lui apporte sa limpidité évitant ainsi les dépôts en bouteilles. Le collage s’effectue en incorporant un produit spécifique dérivant traditionnellement de produits d’origine animale* (des protéines animales) comme la gélatine, la caséine, l’albumine, le blanc d’œuf, la colle de poisson ou bien de protéines levuriennes, végétales comme le pois, le blé, la pomme de terre …ou même l’argile (la bentonite). Le vin reste sous colle une vingtaine de jours (40 jours à Château Margaux). Au-delà, on risque une certaine perte de couleur et d’arômes. L’agent de collage est ensuite élimé par sédimentation (dépôt), par filtration ou par soutirage.

* La poudre de sang de bœuf était aussi autorisée pour le collage, mais cette pratique depuis la crise de la vache folle est désormais révolue en Europe.

Collage au blanc d’oeuf au domaine de Viaud à Lalande-de-Pomerol

Collage, soutirage et filtration

Ces colles vont se combiner avec les éléments à éliminer. Le principe est simple. Les molécules qui se forment alors sont plus lourdes. En se coagulant ou en floculant dans le vin, elles sont  entraînées au fond du fût ou de la cuve. Le soutirage permettra de les séparer du vin propre en le transvasant d’un récipient à un autre, par gravité ou par pompage. Plusieurs autres soutirages seront nécessaire lors de l’élevage pour obtenir un vin affiné et limpide, prêt à être mis en bouteilles. La plupart des producteurs pratiquent également le filtrage pour éliminer toutes traces de particules en suspension (levures, bactéries…) au détriment souvent d’une perte en puissance aromatique (un vin non filtré peut entraîner certaines altérations en bouteilles). Mais environ 95 % des vins sont collés et filtrés. Nombreux sont pourtant  les producteurs de vins bio à renoncer au filtrage de leurs vins, bien qu’ils aient été préalablement collés. Rassurez-vous, l’apparence un peu trouble qu’on peut constater quelquefois n’altère en rien les qualités organoleptiques de ces vins.

Déviations organoleptiques et troubles

Collage au blan d'oeuf
Au château Bellegrave à Pomerol, opération de collage au blanc d’œuf frais bio à raison d’environ 25 ml/hl soit moins d’1 blanc d’œuf par hectolitre.

Les particules en suspension dans le vin après fermentation peuvent  être à l’origine de déviations organoleptiques et de troubles. Il s’agit de certaines substances colloïdales hydrophobes (de la matière dispersée dans le vin mais sans se diluer) comme les cristaux de tartre ainsi que certains complexes métalliques tels que le cuivre, le fer, le zinc ou le manganèse. Le collage des vins permet d’éliminer ces colloïdes (mais malheureusement tous ne sont pas néfastes). On obtient ainsi un produit limpide, stable, mieux filtrable, plus facile à manipuler et généralement de meilleure qualité organoleptique par la réduction notamment du caractère astringent. Le collage aide aussi à la stabilité protéique du vin. La présence de protéines instables dans les vins blancs et rosés* peut en effet provoquer l’apparition d’un trouble en bouteilles (la casse protéique). Il apporte en plus  une stabilité microbienne et chromatique.

* le sauvignon ou le colombard sont connus pour être des cépages riches en protéines thermo-instables.

Quid des produits de collage après la clarification ?

Que deviennent ces produits de collage, une fois la clarification achevée ? A priori, ces substances ne restent pas dans le vin ou tout au moins en quantités infinitésimales. Elles sont éliminées lors de la levée de colle (d’ailleurs on parle  plutôt d’adjuvant et non d’additif). Mais tout risque n’est  pas à exclure. Prenons l’exemple du collage au blanc d’œuf * (et sa principale protéine, l’albumine)  souvent bio, utilisé frais (ou sous forme de poudre réhydratée) ou du collage au lait (et ses deux protéines, la caséine et le lysozyme avec sa fonction antibactérienne). C’est une vieille pratique qui a toujours fait preuve de son efficacité. Que le vin soit filtré ou non, les résidus d’œuf ou de lait sont éliminés avec les impuretés qu’ils ont drainées, par des soutirages successifs des cuves soutient Michal Issaly vigneron à Gaillac qui fut de 2008 à 2014 président des Vignerons Indépendants.

Les allergènes sur l’étiquette 

Depuis le 30 juin 2012, la réglementation européenne  impose de mentionner sur l’étiquette la présence des produits allergènes utilisés lors du collage du vin.

L’objectif est de prévenir le moindre risque d’allergies si minimes soient-ils à ces produits chez les consommateurs (les allergies à l’œuf et au lait sont rarissimes chez les adultes). Pourtant, la réglementation européenne demande  aux producteurs une recherche systématique de ces composants et de procéder à un étiquetage spécifique lorsque les quantités détectées dépassent 0,25 mg/l. Ainsi les vins depuis juin 2012 doivent indiquer la présence de dérivés de blé, d’œuf et de lait, ingrédients considérés comme potentiellement allergènes. Les doses utilisées sont pourtant aujourd’hui très faibles, de 5 g/hl  pour la caséine et de 10 à 20 g pour le blanc d’œuf alors que pour les sulfites, la seule mention sur la bouteille contient de sulfites est suffisante mais sans  aucune quantification. La limite légale est de 180 mg/l de métabisulfites (le fameux E224) face aux 3 ou 4 mg/l naturellement présents dans le vin.

Face aux végétariens et aux végétaliens

Pour les végétariens ou même les végétaliens (ni produits laitiers ni œufs), impossible d’utiliser des sous-produits d’origine animale. Il faut donc se tourner vers des produits d’origine minérale comme la bentonite (argile naturelle), d’origine levurienne ou d’origine végétale issus de ces matières protéiques comme le blé, le pois, le soja ou même la pomme de terre. Ils représentent aujourd’hui une bonne alternative aux produits traditionnels à base de caséine et d’ovalbumine. Autre sujet à polémiques : s’assurer qu’ils ne soient pas des OGM (organisme génétiquement modifié). La France interdit en effet la culture des OGM sur son territoire depuis 2008. Mais des denrées alimentaires génétiquement modifiées peuvent tout de même être importées.

Liste des 10 produits de collage du vin les plus utilisés

Blanc d’oeuf liquide. Ces flacons contiennent de l’Ovalbumine, une colle organique, issue du blanc d’œuf.
  • La bentonite (en solution ou en poudre) est utilisée pour le débourbage, la clarification et la stabilisation des vins blancs ou rosés (troubles protéiques, casse cuivrique), des vins rouges thermovinifiés. Ce sont des argiles naturelles qui fixent les colloïdes des vins rouges et les protéines des blancs.
  • La gélatine utilisée pour la clarification des vins rouges ou rosés diminue aussi l’amertume et l’astringence. Les protéines sont extraites du collagène de peaux ou d’os (porc), plus ou moins hydrolysées par chauffage et traitements.
  • Le gel de silice active le collage et compacte les bourbes. Il est utilisé en combinaison avec la gélatine afin d’accélérer le collage de cette dernière et d’avoir un meilleur compactage des bourbes. Ce sont des suspensions de silice qui forment des gels à pH bas. Chargés négativement, il réagissent avec les protéines du vin.
  • La caséine sert à la clarification des vins blancs et rosés et prévient ou traite des phénomènes de madérisation. C’est la principale protéine du lait, utilisée sous forme de caséinate (ou caséine) de potassium plus soluble dans l’eau.
  • La colle de Poisson (Protéine brute directement extraite de vessies natatoires de poissons) est utilisée pour la clarification des vins blancs et rosés. Elle apporte brillance et finesse.

    Colle de poisson
  • L’albumine d’oeuf sert à la clarification des vins rouges de garde. C’est une colle douce qui ménage les qualités organoleptiques des vins. Il s’agit du blanc de l’oeuf, utilisable frais, congelé ou sous forme de poudre à réhydrater.
  • La PVPP (Polyvinylpolypyrrolidone) interdite en bio, est une colle de synthèse, parfois appelée fausse protéine qui possède une forte affinité avec les polyphénols (molécules supports des principales propriétés organoleptiques des vins) en les fixant. La PVPP possède 6 propriétés : elle absorbe une partie des composés phénoliques ; elle élimine une partie des tannins astringents et des molécules responsables de l’amertume ; elle empêche le jaunissement des vins blancs ; elle s’oppose à la madérisation et permet d’améliorer les vins blancs madérisés ; elle est totalement insoluble et est éliminée dans le vin sans aucun résidu et enfin, elle n’affecte pas les arômes du vin. (Son risque cancérigène est sujet à débat chez les scientifiques).
  • Extraits Protéiques de Levures (ou EPL). Ces extraits riches en protéines proviennent du cytoplasme de la levure Saccharomyces sp, parfaitement adaptés au collage des vins rouges en diminuant les tannins les plus agressifs et en entraînant une diminution de l’astringence et de l’amertume des vins. Ils agissent aussi en  diminuant la turbidité et accélèrent la sédimentation. En pratique, ces EPL représentent une bonne alternative à l’albumine d’œuf ou à la gélatine, sur des vins de macération longue ou des vins blancs issus de fermentation en barrique.
  • La chitine-glucane (interdit en bio). En 2010, l’Union Européenne a autorisé en œnologie deux produits obtenus par la chitine : le chitosane et la chitine-glucane d’origine fongique. La chitine est le biopolymère (le polymère est une molécule formée de plusieurs molécules) issu d’organismes vivants le plus abondant sur terre après la cellulose. Elle se trouve dans les champignons et les algues mais aussi chez les insectes et crustacés, dans les mollusques et même dans certains fossiles. La chitine-glucane précipite et sédimente entraînant les composés indésirables au fond de cuve ; elle facilite le débourbage et la clarification des moûts et des vins. Elle sert aussi de traitement préventif des casses protéiques.
  • Le chitosane (interdit en bio) est connu pour sa biocompatibilité et sa non toxicité. Il possède des propriétés antimicrobiennes contre les bactéries, les organismes fongiques et les levures. Il a été démontré que le chitosane permet de ramener le taux en brettanomyces* en dessous du seuil de perception qui est de 400-450 µg/l (le microgramme est l’unité de masse égale à un millionième de gramme) et ceci même pour des cuves fortement infectées. il réduit les teneurs en métaux lourds (fer, plomb, cadmium, cuivre) ; prévient la casse ferrique et cuivrique et réduit les contaminants éventuels, en particulier l’OTA (ou l’Ochratoxine A), une mycotoxine susceptible de contaminer le raisin et le vin.

* Brettanomyces est une famille de levures (micro-organisme d’altération) qui contamine le vin rouge lui apportant un caractère phénolé ou goût de Brett relativement fréquent dan les vins rouges : sueur de cheval, écurie, poulailler, encre, gouache…Pour lutter contre ces levures Brettanomyces, l’utilisation de chitosane à 4g/hl est autorisée par l’OIV (Office International du Vin) depuis 2009 et par l’Union Européenne depuis mars 2011. Autres moyens de lutte : la flash-pasteurisation, la filtration stérile, l’emploi de DMDC ou Dicarbonate de diméthyle qui permet de les éliminer.

Ce qui est ou n’est pas autorisé en bio pour le collage

Voici ce qui est aujourd’hui autorisé par la réglementation bio européenne : uniquement les protéines de pois, la caséine et la bentonite. Les protéines de pomme de terre, les levures inactivées et la chitine-glucane restent interdites jusqu’à ce jour.

Nouveau : un extrait de protéines végétales issues de la pomme de terre

Ces nouvelles protéines végétales issue de la pomme de terre ont été commercialisées par Laffort.

De nouvelles protéines végétales issue de la pomme de terre ont été commercialisées par Laffort *, le Vegecoll®. Cet agent de clarification extrait protéique de la pomme de terre assure la stabilité protéique, microbienne et chromatique, la réduction des caractères astringents et l’affinage aromatique. A base de protéines végétales et il est donc non allergène. Il a été spécialement sélectionné pour ses qualités de clarification pour le collage des moûts et des vins blancs, rosés et rouges. Sa haute concentration en protéines en fait une des protéines les plus réactives en oenologie. Le Vegecoll s’utilise sur moûts (notamment en flottation**, avec un temps de tassement très court et l’élimination des composés phénoliques oxydés ou oxydables), sur vins blancs, rosés et rouges (forte capacité de clarification, vitesse de sédimentation rapide, stabilisation de la matière colorante et élimination des tannins astringents des vins rouges).

* Laffort est leader mondial de la recherche œnologique. Ce groupe bordelais recense 270 salariés dont 140 à Bordeaux.

** La flottation est une technique relativement récente de débourbage des moûts de blancs, rosés et même rouges, lorsque ces derniers sont issus de thermovinification (une extraction à chaud). Le procédé de flottation repose sur l’entraînement vers la surface des particules solides, par de fines bulles de gaz. C’est une technique plus économique qu’un débourbage classique.

Un procédé commun de collage en ligne des vins rouges et rosés récompensé par le Trophée de l’Innovation Vinitech Sifel 2016

Ce procédé de collage en ligne des vins rouges et rosés porte sur le couplage de la filtration tangentielle* Flavy FX ICS de Bucher Vaslin  avec un ajout en continu de colle protéique d’origine végétale de pomme de terre, (le Vegecoll produit et commercialisé par la Société Laffort). Ce couplage permet en une seule opération de stabiliser le vin vis-à-vis de ses composés polyphénoliques et de le clarifier. Ce procédé tout en un, d’une grande simplicité a été récompensées par une Citation aux Trophées de l’Innovation Vinitech Sifel 2016.

*La filtration tangentielle contrairement à la filtration frontale permet de limiter l’accumulation de particules, grâce à la circulation tangentielle du vin, à la surface de la membrane. Les particules restent dans le flux de circulation alors que le vin peut traverser la membrane sous l’effet de la pression.

 

François

  • 1990 – Les grands vins du monde, préfacé par Gérard Depardieu. 
  • 1992 – Grands et petits vins de France, préfacé par Jean Carmet.
  • 1996 – Le guide des grands et petits vins de France, préfacé par Alain Favereau.
  • 2000 – The Flammarion Guide to World Wines
  • 2013 – Les vignobles mythiques, aux éditions Belin préfacé par Pierre Lurton (Cheval Blanc et Yquem).
  • 2014 – Prix Amunategui-Curnonsky décerné par l’APCIG (association professionnelle des chroniqueurs de la gastronomie et du vin).
  • 2016 – Cépages & Vins aux éditions Dunod.
  • 2020 – Cépages & Vins, nouvelle édition, éditions Dunod.

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