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Yonne, vignobles de l’Yonne dont Chablis (Bourgogne)

Les vignoble de l’Yonne dont Chablis* sont les plus septentrio­naux de la Bourgogne. Ce département qui s’étend sur 7500 km2, compte 350 000 habitants qu’on appelle les icaunais. Il y a plus de 120 ans, l’Yonne était un des départements français les plus viticoles fournissant à lui seul les deux tiers de tous les vins de Bourgo­gne. Il approvisionnait la région parisienne et ses vins étaient acheminés par voie d’eau sur des trains de bois descendant du Morvan. Vincelles et Vincelottes, communes situées au bord de l’Yon­ne, évoquent encore ce commerce actif du vin dans la région. Le vignoble couvrait alors environ 40 000 ha et occupait principalement les coteaux dominant les vallées de l’Yonne, la Cure, le Serein, l’Armançon et le Tholon.

*Voir tableau des appellations AOC/AOP

Une formidable renaissance

L’invasion phylloxérique a porté un coup terri­ble à tous ces vignobles, et les replantations sur porte-greffes résistant aux attaques du parasite n’ont été vraiment réalisées que dans les terroirs les plus favorables à la production de vins de qua­lité. Mais aujourd’hui, partout dans l’Yonne les vignobles sont en pleine renaissance et les vins affichent une qualité et une réputation méritée et grandissante.

Des cépages propres à son vignoble

L’encépagement de l’Yonne, qui ne comportait pas moins d’une trentaine de variétés, se réduisit à une dizaine, pour ne conserver actuellement que les cépages les plus fins et les plus dignes de défendre le renom de la Bourgogne. Le seul bémol, pourrait-on dire, est la difficulté du pinot noir à mûrir les années difficiles. Par contre, les grandes années, quelle splendeur ! Des vins marqués par les fruits rouges frais, les épices et par un côté charmeur qu’on ne rencon­tre qu’ici. En dehors des cépages traditionnels (chardonnay, pinot noir, ou encore l’aligoté), l’Yonne s’enorgueillit d’avoir conservé quelques cépages propres à son vignoble :

Cépage césar à Irancy
César, cépage rare implanté à Irancy

le césar ou romain, implanté ici avant l’invasion de la Gaule. Il est cultivé surtout en Auxerrois. Le césar peut ainsi entrer dans la composition de l’Irancy à hauteur de 10 % maximum. Il est reconnaissable à ses feuilles très découpées et dentelées. Le tressot mentionné pour la première fois au XIVe siècle est un cépage généreux et vigoureux assemblé en général au pinot et au césar. Le melon qu’on trouve encore aujourd’hui fut au XVIIe siècle le cépage le plus cultivé dans la région. Son défaut est son abondance au détriment de la qualité. Moines et notables se liguèrent pour en enrayer son développement. Enfin, il existe une exception en Bour­gogne, le sauvignon. On le trouve uniquement à Saint-Bris-le-Vineux, un vignoble qui, depuis 2003 suprême reconnaissance, bénéficie d’une AOC propre. Bien des raisons donc pour « billebauder », comme le suggérait Henri Vincenot au milieu des ceps de ce département passionnément vineux.

De la grande Colette, à la frêle Marie-Noël

Colette
Colette,

Qui à Auxerre, voyant la frêle silhouette de la poétesse Marie-Noël représentée par le sculpteur Brochet près de la tour de l’Horloge, se rappelle encore les paroles qu’elle prononça à la gloire des vins de l’Yonne,  son pays ? C’était à la Paulée de Meursault en 1958. « Depuis que ma géniale payse, la grande Colette (elle était de la Puisaye toute proche) n’est plus, où trouverez-vous une fille qui sache comme je le sais d’enfance ce qu’était sombrer une vigne, la rueller, la biner, l’écouler,  l’essoumacer … Qui ait en souci plus que moi de la gelée de mai, du ver, de la chenille … Une fillette plus capable, en se promenant dans les perchées, de reconnaître avec effroi, à telles sinistres feuilles jaunes, la présence, aux racines du cep, de l’effroyable phylloxéra ?  »

Liste des vignobles et des vins produits dans L’Yonne  

I/ Vignoble de l’Auxerrois 

C’est le secteur sud d’Auxerre : 611 ha dans un paysages vallonnés de collines et de côtes, sur des terrains du jurassique moyen et supérieur (calcaires, marnes, argiles) avec une production annuelle de 3,9 millions de bouteilles.

Vignoble d'Irancy
Vignoble d’Irancy qui fête en 2015, les 15 ans de son AOC
  • Bourgogne, vins rouges, blancs et rosés.
  • Bourgogne Côtes d’Auxerre : vins rouges, blancs et rosés. 122 ha en rouge, 75 ha en blanc sur 7 communes de production : Augy, Saint-Bris-le-Vineux, Auxerre, Vaux, Champs-sur-Yonne, Quenne, Vincelottes. Production annuelle en rouge : 800 000 bouteilles et en blanc : 562 000 bouteilles.
  • Bourgogne Coulanges-la-Vineuse : vins rouges, blancs et rosés. 135 ha  sur 5 communes : Coulanges la Vineuse, Escolives Sainte-Camille, Jussy, Migé et Mouffy.
  • Bourgogne Chitry : vins rouges, blancs et rosés. 30 ha en blanc et 27 ha en rouge et rosé sur la seule commune de Chitry. Production annuelle : 300 000 bouteilles en blanc et 180 000 bouteilles en rouge et rosé.
  • Irancy : vin rouge. 159 ha sur 3 communes de production : Irancy, Cravant et Vincelottes pour une production d’environ 1 million de bouteilles.

    Saint-Bris-le Vineux
    Saint-Bris-le-Vineux, AOC depuis 2003
  • Saint-Bris : vin blanc sec. 133 ha sur 5 communes de production : Saint-Bris-le-Vineux, Chitry, Irancy, Quenne, Vincelottes et pour une production d’environ 1 million de bouteilles par an.

 II/ Vignoble de Joigny

Les 20 ha s’étendent au pied de la forêt d’Othe, paysage de coteaux qui surplombent la vallée de l’Yonne (communes de Joigny, Champvallon et Volgré) sur des sols calcaires tendres du Crétacé supérieur, riches en  argiles à silex de la craie du Turonien. La production annuelle est d’environ 100 000 bouteilles.

Carte du vignoble de Joigny
La carte du vignoble de Joigny
  • Bourgogne, vins rouges, blancs et rosés.
  • Bourgogne Côte Saint-Jacques (dominant la ville de Joigny) : vins rouges, blancs et rosés. Vins gris élaborés avec le pinot gris. 19,22 ha en rouge et rosé et 0,18 ha en blanc sur une seule commune de production : Joigny. Production annuelle en rouge et rosé : 102 000 bouteilles et 1900 bouteilles en blanc.

III/ Vignoble du Tonnerrois

Il couvre le secteur de Tonnerre et d’Epineuil : 117 ha de coteaux pentus dans la vallée de l’Armançon. Le vignoble s’étage entre 180 et 250 m sur des terrains du jurassique moyen et supérieur (calcaires, marnes, argiles). La production annuelle tourne autour de 700 000 bouteilles.

  • Bourgogne Tonnerre : vins blancs secs. 29,25 ha sur 6 communes de production : Dannemoine, Épineuil, Junay, Molosmes, Tonnerre et Vézinnes. Production annuelle : 300 000 bouteilles.
  • Bourgogne Epineuil : vins rouges et rosés. 75 ha sur la seule commune d’Epineuil pour une production annuelle de 475 000 bouteilles.

IV/ Vignoble de Vézelay

Vignoble de Vézelay
Vignoble de Vézelay, la colline inspirée

64 ha aux portes du Morvan, sur  la colline éternelle et en contrebas de la basilique Sainte-Marie-Madeleine inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis plus de 30 ans. Un vignoble de coteaux autour de Vézelay dominant la vallée de la Cure sur des terrains du jurassique moyen et supérieur (argiles, calcaires et marnes du Bathonien) et 4 communes de production : Vézelay, Asquins, Saint-Père et Tharoiseau. La production annuelle est d’environ 350 000 bouteilles.

V/ Chablis, le Chablisien

Chablis, vignoble de l'Yonne
Chablis, vignoble emblématique de l’Yonne (Photo FC)

Le Chablis est produit autour de Chablis, commune de 2600 habitants située à 20 km à l’est d’Auxerre ainsi que sur les 19 villages et hameaux sur lesquels se répartit le vignoble chablisien. Porte d’or de la Bourgogne, Chablis, à 180 km de Paris, et à 100 km plus au nord que le reste du vignoble Bourguignon offre à l’Yonne son plus beau fleuron : un vin blanc vif, léger, limpide, à la robe or-vert pâle, à la sécheresse de silex. Sa réputation fit le tour du monde, au point qu’il arrivait de rencontrer d’illégitimes Chablis américains, australiens ou même argentins. 1997 marque une victoire décisive remportée au Japon avec l’élimination des faux Chablis californiens. Heureusement, le mot chardonnay a tendance à le remplacer.

Les moines cisterciens de l’abbaye Pontigny

Toutes appellations confondues, le vignoble couvre près de 5000 ha en surface plantée sur un secteur de 16 km de long et 10 km de large, entre Auxerre et Tonnerre. La renommée du vignoble remonte à la Gaule, mais son véritable essor date du XIIe siècle. II est dû aux moines cisterciens de l’abbaye de Pontigny, à 15 km de Chablis, qui répandirent la culture du chardonnay, surnommé beaunois. Très curieusement, le phylloxéra ne toucha la région que très tard, en 1893, à la suite d’un été très chaud. Ce fut une chance pour ce vignoble qui put être reconstitué très rapidement par greffage des variétés locales sur des souches et des hybrides américains. II ne retrouva sa véritable réputation qu’en 1936, grâce aux lois sur les appellations contrôlées.

L'abbaye de Pontigny à l'origine de la renommée du Chablis
L’abbaye de Pontigny à l’origine de la renommée
du Chablis

Des marnes du jurassique supérieur

Les vignes les plus réputées sont situées entre la vallée du Serein et le plateau, sur des pentes bien exposées, parfois très accentuées (15 à 20 % de déclivité) : un travail pénible pour le vigneron qui doit sans cesse remonter les terres arables accumulées au bas des pentes. Le sol caillouteux est constitué d’une épaisse couche de calcaire et de marne dit du kimmeridgien (jurassique supérieur), des calcaires marneux et des marnes argileuses, sortes de glaise qui transparaissent partout dans les vignobles. Le plateau, à 200 m de hauteur, formé de calcaire dur (du portlandien), supporte des sols plus légers que l’on appelle « petite terre », C’est le domaine des « petits chablis ».

Contre le gel, des fils électriques chauffants

Le climat de cette zone très septentrionale se révèle incertain : les hivers  y sont froids, les gelées tardives fréquentes en mai. On se souvient encore du terrible printemps 1957 ou encore de l’année 1961 où la quasi-totalité de la vendange fut détruite. Pour éviter de telles catastrophes, l’utilisation de chaufferettes à fuel, d’hélices, d’aspersions se généralise. Dans ce sens, EDF a mis au point un câble électrique chauffant fixé au bas des vignes qui fait de plus en plus d’adeptes.

Chaptalisation autorisée

Dans le Chablis, un seul cépage est autorisé : le chardonnay. II est taillé bas et court, pour que le sol et crayeux réverbère la chaleur du soleil sur les grappes, activant ainsi sa maturation. Les vendanges  peuvent commencer grâce au réchauffement climatique de ces 15 dernières années dès la mi-septembre jusqu’à début octobre. Sans attendre, le raisin est pressé pour être ensuite stocké dans d’immenses cuves en inox. Si le raisin ne peut fournir la quantité d’alcool nécessaire, il faut chaptaliser, c’est-à-dire ajouter du sucre aux moûts avant fermentation. Cette pratique, autorisée par la loi, est la seule susceptible, les mauvaises années, de préserver la grande qualité des Chablis. Le premier soutirage a lieu en février et, de dix à vingt mois après les vendanges, le Chablis est mis en bouteilles. Élevé en fût, la touche boisée bien maîtrisée, il se montre plus riche et plus corsé. Dans tous les cas, c’est un vin à la robe or-vert, d’une limpidité et d’une fraîcheur exquise. De la sécheresse, une certaine nervosité en bouche, un mordant typique, tels sont les grands Chablis à la réputation universelle.

Vers une maîtrise des surplus

Aujourd’hui il, existe à Chablis des quotas pour les rendements. En cas de dépassement, obligation est alors faite de distiller le surplus. Le projet déposé à I’INAO prévoit de pouvoir stocker les surplus en cas de récolte excédentaire et réutiliser cet excédent lors d’années déficitaires. Chaque viticulteur aurait ainsi la possibilité de stocker ce qui est appelé un VCI (volume complémentaire individuel), soit environ 10 hectolitres par hectare et par an.

La Chablisienne, une grande coopérative et son château Grenouilles

Production de la Chablisienne
Production de la Chablisienne

La plus célèbre et la plus ancienne coopérative de ce département est la Chablisienne qui depuis 1923 propose ses Chablis en vinifiant le quart de l’appellation (en 2013, elle célébrait avec ses 240 adhérents ses 90 ans d’existence). La Chablisienne se distingue par son Château Grenouilles, le seul château de la colline des Grands Crus, dont elle est propriétaire depuis 2003. Ce domaine de 7,20 ha d’un seul tenant (soit la quasi-totalité du climat qui compte 9,4 ha) est magnifiquement exposé au sud-ouest face au village. Grenouilles est issu d’une sélection de parcelles de vieilles vignes (40 ans d’âge moyen) offrant un Chablis mythique dans la plus belle expression de sa minéralité. Cette coopérative, sans doute la plus connue de France élue par la Revue des vins de France coopérative de l’année en 1996 puis en 2013, possède 1250 ha en surface de production pour 8,5 millions de bouteilles commercialisées en 2012. Elle compte 62 salariés et un chiffre d’affaires de 47 m d’€ dont 70 % à l’export.

Chablis en quatre appellations

  • Petit Chablis, la base de la hiérarchie des vins de Chablis,  sur 729 ha, récolté majoritairement sur les plateaux. Un vin sec et minéral à apprécier 2 à 3 années après la récolte.
  • Chablis, sur 3.156 ha, planté sur les coteaux.
  • Chablis Premier Cru, sur 767 ha, sur les coteaux exposés principalement au sud-ouest et au sud-est.
  • Chablis Grand Cru, sur 106 ha (2 % du vignoble chablisien). Ils s’étagent sur la célèbre colline des Grands Crus, face au village de Chablis, sur la rive droite du Serein. Les coteaux sont exposés majoritairement au sud-ouest. Sept crus (climats) exceptionnels se partagent l’appellation Grand Cru : Blanchot  (12,93 ha) ; Bougros (15,79 ha) ; Les Clos (28,39 ha) ; Grenouilles (9,38 ha) ; Preuses (11,43 ha) ; Valmur (11,04 ha) ; Vaudésir (14,49 ha).

    Chablis de la colline des Grands Crus
    Chablis, de la colline des Grands Crus (Photo FC)

Un huitième Grand Cru ?

On pourrait y ajouter La Moutonne, chevauchant Les Preuses et Vaudésir, exclu du classement pour une sombre histoire datant de la Révolution française.Qu’est-ce qui rend ces crus plus admirables, plus secs, plus racés que les autres ? Leur terrain, peut-être, reposant sur un sous-sol kimméridgien, l’ensoleillement sûrement ! Leur rendement est fixé par la loi à 35 hl/ha. Ils doivent titrer un minimum de 11°. Ajoutons la patience. La capacité de vieillissement de ces vins est étonnante. Une bonne dizaine d’années sont nécessaires pour qu’ils s’apaisent, s’équilibrent pour qu’ils acquièrent en plénitude cet extraordinaire bouquet minéral. En 2000 était fondée l’Union des grands crus de Chablis regroupant 13 membres tous propriétaires dans les grands crus, qui adhérèrent à une charte de qualité très stricte (8 000 pieds à l’hectare, « viticulture raisonnée », maîtrise des rendements, vendange en vert, vendange manuelle, etc.).

François

  • 1990 – Les grands vins du monde, préfacé par Gérard Depardieu. 
  • 1992 – Grands et petits vins de France, préfacé par Jean Carmet.
  • 1996 – Le guide des grands et petits vins de France, préfacé par Alain Favereau.
  • 2000 – The Flammarion Guide to World Wines
  • 2013 – Les vignobles mythiques, aux éditions Belin préfacé par Pierre Lurton (Cheval Blanc et Yquem).
  • 2014 – Prix Amunategui-Curnonsky décerné par l’APCIG (association professionnelle des chroniqueurs de la gastronomie et du vin).
  • 2016 – Cépages & Vins aux éditions Dunod.
  • 2020 – Cépages & Vins, nouvelle édition, éditions Dunod.

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